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CLOPIN - CLOPANT

28 décembre 2017

Portrait sensible - Dominique Sampiero

Portrait sensible

 

Dominique SAMPIRO

Né dans le Nord de la France en 1954. Instituteur et directeur d’école maternelle dans le Denaisis, il anime également des ateliers d’écriture. Il a été membre de la commission Poésie au Centre national du Livre en 1996.

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27 décembre 2017

En effet, mon trio structurant gravite autour de

En effet, mon trio structurant gravite autour de trois passions : les livres, le sport et la musique. Baignée dès la plus tendre enfance, et ce dès le ventre de ma chère Maman, dans l’univers envoûtant des Nocturnes de Chopin (celui en ré bémol majeur, …), de L’Art de la Fugue ou du Clavier bien tempéré de Bach, de la virtuosité mozartienne (le chef-d’œuvre de La Grande messe en ut mineur, …), des prouesses harmoniques de Beethoven (Concerto pour piano et orchestre n°5 « L’Empereur » en mi bémol majeur, …), de Liszt (Sonate en si mineur, …) et de Berlioz (La Symphonie fantastique, …), du monde enchanteur de l’opéra où puissance, dynamique et lyrisme aboutissent grâce au degré de perfection et d’intensité de « La Voix » à une fusion souveraine de l’art du chant et de celui du jeu d’acteur (Norma de Bellini, Lucia di Lammermoor de Donizetti, Madame Butterfly de Puccini, Faust de Gounod, Alceste de Gluck, Lakmé de Delibes, La Traviata de Verdi, Samson et Dalila de Saint-Saëns, Le Cid de Massenet, …), j’éprouve un plaisir viscéral de leur audition, compréhension et personnalisation ! La musique dite « classique » me donne une force vitale pour affronter les vicissitudes et petites surprises (pas vraiment drôles en ce moment) de la vie. Mais je tiens à ajouter la place intégrante et formatrice du jazz, des musiques du monde (« son » cubain, « fado » portugais, « tango » argentin, …), du délice de la rencontre d’un texte et d’une mélodie dans les grandes chansons françaises et aussi de l’adhésion au son et au rythme de la pop anglaise. Merveille de la technique qui me permet de me vautrer frénétiquement, assidûment et presque orgiaquement dans ma « voie lactée » musicale.

24 décembre 2017

Ecrits de nuit pour noctiluque - Virgile Novarina

Ecrits de nuit pour noctiluque

2049 :

Virgile NOVARINA

Né en 1976, il écrit et dessine la nuit des bribes venant du sommeil profond. Publications dans diverses revues, dont "Trajectoire(s)", "Le Bout des Bordes", "Java", Action poétique, Rehauts, Fin, Boudoirs et autres, SUpérieur Inconnu.

21 décembre 2017

La République est toujours en danger La

La République est toujours en danger

La politique, telle qu’elle est pratiquée en France, est décidément bien étrange. Elle compte un grand nombre d’hommes et de femmes de qualité, dévoués à la chose publique, instruits par de brillantes études dans les meilleures écoles et universités, là où on apprend à étayer son raisonnement, et, chaque fois qu’un débat d’importance est lancé, exigeant clairvoyance et hauteur de vue, elle tombe dans les préjugés et devient inintelligente. Exemple : l’insécurité.
Le ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, continue de travailler sur un projet de loi dont l’attirail juridique devrait permettre de lutter avec davantage d’efficacité contre la délinquance. Il a été nommé à ce poste pour accomplir cette mission extrêmement compliquée comme, avant lui, tous ses prédécesseurs qui, à en croire les premiers intéressés, c’est-à-dire les Français, ont globalement échoué. C’était – on se doit de s’en souvenir – l’enseignement de la dernière présidentielle et l’explication, entre autres, de l’effrayant score de Jean-Marie Le Pen.
Ne pas agir, après un tel coup de semonce électorale, serait une faute. On ne peut à la fois verser toutes les larmes de son corps sur la montée inquiétante de l’extrême droite et ne rien faire pour la contrer. La lutte contre l’insécurité est l’une des manières de renvoyer Le Pen dans une marginalité dont il n’aurait jamais dû sortir. Il y a urgence et devoir à prendre des mesures. Sarkozy s’y emploie. Et on lui colle immédiatement sur le dos des étiquettes infamantes, l’accusant de vouloir établir en France un Etat policier.
Le projet Sarkozy, pour ce qu’on en connaît, est peut-être amendable, voire critiquable. Mais ce ministre de l’Intérieur, au moins, avance et propose. Qu’on discute alors de ce qu’il entend faire au lieu de l’épingler d’entrée sans prendre le soin élémentaire de réfléchir à ses solutions ou à celles qu’il faudrait avancer. Ce serait là le fonctionnement normal d’une démocratie vivante. Elle est, en France, ankylosée. À entendre les belles âmes déchaînées contre ce projet – attentatoire, disent-elles, à nos libertés -, la République serait en danger. Elle l’est effectivement. Mais pas à cause de Sarkozy.
La République est en danger parce qu’il y a quelques mois un authentique néofasciste, indigne d’un pays de grande culture comme la France, est arrivé au second tour de la présidentielle et menace, si rien n’est fait, de pervertir d’autres scrutins. La République est en danger parce qu’une forte proportion de Français, parmi les plus défavorisés, vivent dans une insécurité grandissante dont la conséquence à terme est de briser le contrat qui les unit à la société. La République est en danger parce que, depuis des années, la classe politique mais aussi les parents et les citoyens, tous en charge de la défendre, ont baissé la garde et abdiqué leur autorité, abandonnant les banlieues et les quartiers à haut risque dans des jachères de non-droit, laissant les proxénètes exercer leur commerce, ignorant les drames des immigrés clandestins embrigadés dans des filières esclavagistes. On pourrait également parler des dealers et des réseaux organisés du commerce de la drogue,…
La République est, toujours, en danger… et les politiques continuent à se chamailler. Ils devraient lire et apprendre par cœur ce petit texte qui parle des jeunes et, au-delà, de tous les individus qui composent une société : « Lorsque les pères s’habituent à laisser faire les enfants, lorsque les fils ne tiennent plus compte de leurs paroles, lorsque les maîtres tremblent devant leurs élèves et préfèrent les flatter, lorsque finalement, les jeunes méprisent les lois parce qu’ils ne reconnaissent plus, au-dessus d’eux, l’autorité de rien et de personne, alors c’est là, en toute liberté et en toute jeunesse, le début de la tyrannie. »
Ces lignes, si actuelles, ont été écrites par un très ancien philosophe : Platon (env. 427-348 avant J-C).

20 décembre 2017

Les Fleurs du Mal

III/ LE RECUEIL POETIQUE
UN PROJET :"EXTRAIRE LA BEAUTE DU MAL"

0.        Publié en 1857, le recueil poétique  Les Fleurs du Mal  de Charles Baudelaire est formé de 6 parties évoquant les 4 grands thèmes principaux que l'auteur a voulu faire partager aux lecteurs.
0.        Dans ce livre de poésie, Baudelaire a mis toute sa pensée, tout son cœur, toute sa religion (en quelque sorte) mais aussi toute sa haine. Il fait de ce recueil, un recueil lyrique mais qui affirme toutefois une certaine différence avec le romantisme de l'époque. Le lyrisme donne toute son unité à l'oeuvre car il décrit toute la confession que l'auteur nous fait de son mal, de ses espérances, de ses défaillances et de sa déchéance. Baudelaire se propose donc " d'extraire la beauté du Mal ". Grâce à sa propre expérience, le poète a voulu retracer en partie la tragédie de l'être humain, qui selon lui, est dissimulée continuellement sous une fausse pudeur.
0.        Les thèmes et l'écriture marquent l'originalité de cette oeuvre qui pour certains censeurs "offense la morale". Or, selon Baudelaire: "La poésie ne peut pas, sous peine de mort ou de déchéance, s'assimiler à la science ou à la morale; elle n'a pas la vérité pour objet, elle n'a qu'Elle-même"
0.    A/ Précurseur du symbolisme, Baudelaire fait usage d'une technique et d'un style.
0.        En octobre 1845, c'est la première fois que Baudelaire constitue le projet de publier un recueil en vers. Jeanne Duval qu'il surnommait la " Vénus Noire " et dont il fit la connaissance en 1842 fut reconnue comme son inspiration noire.
0.    A son époque, Baudelaire est un écrivain situé au carrefour du romantisme, du réalisme, et du tout nouveau symbolisme ainsi que le parnasse : pour pouvoir monter son recueil, il établit plusieurs principes :
0.    la création d'un art moderne et éternel
0.    surprendre les personnes qui partageront ses pensées : " l'irrégularité c'est à dire l'inattendu, la surprise, l'étonnement sont une partie essentielle et la caractéristique du Beau " selon Baudelaire
0.    la culture de la langue pour sa puissance suggestive
0.    A ces principes s'ajoutent sa technique et son style :
0.    utilisation du sonnet : " Parce que la forme du sonnet est contraignante, l'idée jaillit plus intense " (lettre de Baudelaire à Armand Fraisse)
0.    alliance des correspondances, des métaphores et comparaisons, des sonorités évocatrices, des notations réalistes.
0.    B/ Pourquoi le titre " Les Fleurs du Mal " ?
0.        Avant l'attribution définitive du titre  Les Fleurs du Mal , ce recueil poétique de Baudelaire avait pour titres en 1845/1948  Les Lesbiennes ,  Les Limbes  - dont les pièces intermédiaires étaient les 2 poèmes suivants : " Lesbos " et " Femmes damnées ". Mais finalement le titre  Les Fleurs du Mal  fut adopté. c'est avant tout un titre à oxymore mêlant l'union surprenante de deux termes qui sont plus ou moins contradictoires :
0.    " les fleurs " : elles relèvent de tout ce qui est Beau
0.    " le mal " : il évoque une force irrésistible ( tout comme la beauté ) mais contrairement à la vraie beauté, cette force pousse vers le gouffre et possède le pouvoir de dégager en nous plusieurs puissances cachées qui nous dirigeraient au-delà de nos propres limites. Le mal est ici la corruption triomphante et l'exaltation de l'esprit et des sens.
0.        Ce titre peut aussi bien provoquer étonnement, indignation ou plutôt une séduction de la part du lecteur. Dans cette œuvre, Baudelaire désire l'exaltation de la beauté païenne où se mêle l'harmonie d'un corps vigoureux ainsi que la santé physique des races intactes.
0.    Ces poèmes s'adressent à des femmes que Baudelaire avait torturées (d'amour) ou déçues telles que :
0.    Jeanne Duval surnommée "La Vénus Noire "
0.    Mme Sabatier surnommée " Ange gardien, la Muse et la Madone "
0.    Marie Daubrun surnommée " La fille aux yeux verts, l'Enfant ou la Sœur "
0.        0.        0.   
0.    Ces trois femmes ont donc contribué à une partie de la réalisation du recueil poétique et lui confèrent différentes tonalités.

0.    C/ Une architecture bouleversée par la censure et retravaillée
0.    Les 6 grandes parties du recueil renfermant les 3 thèmes principaux du poète.
0.        A sa publication en 1857, ce recueil se composait de 100 poèmes puis en 1861 il fut constitué de 126 et enfin à sa dernière publication en 1868 le nombre de poèmes fut de 151.
0.    Entre 1857 et 1861, Baudelaire a dû réaménager son recueil en raison de la censure qui touchait 6 poèmes. La structure est remaniée, le recueil enrichi de textes et une nouvelle section est créée:" Tableaux parisiens ".
0.    a) L'édition de 1861 offre une structure en 6 grandes parties.
0.    
〇.    " Spleen et Idéal " : dans cette première partie, le poète décrit avec beaucoup de patience la cruauté de la double position de son être déchiré entre son envie d'une idéalité et d'une pureté perdues et son enfoncement dans les tourments du quotidien qu'il nomme " ennui " et " tristesse " c'est-à-dire le " spleen ". c'est à ce mot anglais qu'il a donné la mission de traduire la multiplicité de ses souffrances morales et physiques.
〇.    " Tableaux Parisiens " : ou " la ville " ou " la fourmillante cité pleine de rêves ". Cette vision impose à la fois au créateur le miroir multiplié de sa laideur et son mal crée un mirage : un lieu magique, fantasmatique où se perdre mais aussi se retrouver.
〇.    " Le vin " : poème désigné comme l'un des plus poèmes qui peuvent inciter les gens à utiliser l'un des " paradis artificiels "( ici l'alcool) pour se libérer du spleen. " Gros rouge des chiffonniers et des assassins, nectar des femmes galantes et des amants ".
〇.    " Les Fleurs du mal " : partie montrant toutes sortes de vices et de " péchés " de la chair, où les " Femmes damnées " se joignent pour " contempler (son) cúur et (son) corps sans montrer signes de dégoûts ".
〇.    " Révolte " : partie où l'homme revenu de toutes les tentations et écœuré de toutes les tentatives interrompues, s'adonne aux malédictions de l'esprit et aux changements de l'âme : injures, blasphèmes, suppliques, la déchéance et Satan, " prince de l'exil " et " dieu trahi par le sort ".
〇.    " La mort " : dernière tentative et ultime ruse à laquelle le " pauvre ", " l'amant " et " l'artiste " contribuent au miracle d'un dernier " voyage " avec l'espérance d'une réconciliation et d'un salut.
〇.   
0.    b) Les six parties du recueil retracent la pensée de Baudelaire dans son état pur
0.    Grâce à cette structure, nous pouvons distinguer les trois thèmes dominants :
0.    Le spleen : sorte de lutte entre l'idéal et l'ennui, c'est alors que le spleen devient peu à peu maître de l'âme. Ce spleen est entretenu par la détresse de Baudelaire, ses ennuis matériels, ses déficiences physiques et morales, les tourments de sa vie amoureuse, l'obsession précoce de la vieillesse et de la mort. On peut citer Spleen (LXXV-LXXVI-LXXVII- LXXVIII ).
0.    Mais hanté par l'Idéal, Baudelaire montre son refus. Les poèmes illustrant ce thèmes sont par exemple " Elévation ", " Parfum exotique ", " L'invitation au voyage ", " Harmonie du soir".
0.    l'amour : à travers cette lutte contre l'ennui (le spleen), l'Amour occupe une place privilégiée dans l'Art. Baudelaire a connu, sans arriver à leur association, les deux formes complémentaires de l'amour humain :
0.    la passion sensuelle qui est un amour inspirant à l'évasion par l'exotisme ou le plaisir esthétique ; cet amour, le poète l'a connu auprès de Jeanne DUVAL.
0.    l'amour spiritualisé, qui est une quête ardente et nostalgique d'une liaison sentimentale ; cet amour, Baudelaire l'a trouvé auprès de Mme SABATIER.
0.   
0.    Les poèmes illustrant ce thème sont :" Parfum exotique ", " Un voyage à Cythère ", " l'invitation au voyage "," Le voyage ", " l'aube spirituelle ", " Que diras-tu ce soir, pauvre âme solitaire ", " Harmonie du soir ".
0.    La mort : elle est la dernière espérance de ceux qui ne peuvent s'accommoder à la médiocrité terrestre. Dans un autre monde, les amants connaîtront un amour libre sans interdits, les pauvres recevront le prix de leurs misères, les artistes torturés par leur idéal verront " s'épanouir les fleurs de leur cerveau ".
Les poèmes illustrant ce thème sont : " La mort des amants ", " La mort des artistes ".

Le recueil  Les Fleurs du mal  éveille également les cinq sens.   
c) Les sens éveillés
1) Le goût : ce registre est parfois symboliquement appelé pour éclairer de l'intérieur mais il a aussi une notation morale
- " Causerie " nous fait sentir l'amertume qui a le goût de l'eau salée.
Le vin étourdissant ou amer enivre moins que les yeux de l'amante ; c'est ce que nous font ressentir " Sed non satiata " et " Le serpent qui danse ". Il est tellement fort que le vin arrive même à se faire entendre dans " l'âme du vin ". De plus, la bouche de l'aimée, haleine ou salive (le Poison) conserve un goût inoubliable.
2) l'odorat : c'est la notion sensorielle la plus présente dans la poésie de " l'olfactif " qui caractérise le recueil de Baudelaire : odeur de la terre après l'orage (" Hymne à la beauté "), puanteur du cadavre (" Une charogne "), vapeurs d'encensoir (" La Muse vénale ", " Harmonie du soir "), ivresse des senteurs exotiques (" La Chevelure "), " âcre odeur du temps, poudreuse et noire " (" Le Flacon "), le parfum de la femme glorifiée en maintes poésies car le désir, " tout se fera Benjoin, Encens, Oliban, Myrrhe " (" A une Madone ").
3) l'ouie : bruits de la nature et singulièrement de la mer, du vent, du feu (" La servante au grand cœur "), la musique (" Le vin des chiffonniers "), mais aussi le son sinistre des ossements (" Le vin de l'assassin ").
4) La vue : dans l'univers noir et ténébreux (" Sed non satiata ", " Semper eadem ", éclatement parfois du bleu des rêves lointains, le rose et le vert (" Le succube verdâtre et le rose lutin ", dans " La Muse malade " ou " Mille pensers "… teintés d'azur, glacés de rose, lamés d'or dans le flacon).
5) Le toucher : deux sensations contraires se partagent l'univers poétique de Baudelaire :
0.    du côté de l'agréable se trouvent le moelleux de l'oreiller (" Les phares ", " Amour du mensonge "), des étoffes ou du lit (" Les deux bonnes sœurs ", "La mort des amants "), la volupté du nageur sillonnant l'onde (" Elévation "), la caresse de la main dans les cheveux (" La Chevelure ").
à l'inverse, on trouvera les griffes et les dents du " Vampire ", le froissement du baiser (" Femmes damnées "), le corrosif remords (" Rêve parisien "). Parfois le chaud (" La vie intérieure "), est aussi pénible que le froid (" La Muse vénale " et également le sonnet sans titre " Avec ses vêtements ondoyants et nacrésÖ ") ou l'humide.
La sensualité, l'érotisme de certains poèmes ont suscité les jugements et reproches d'une bourgeoisie soucieuse de la morale ainsi que le montre le procès des Fleurs du mal de Baudelaire.
La plupart des couvertures du recueil orientent vers une lecture placée sous le signe de la sensualité et même de l'érotisme.

[sommaire] [intro] [partie I] [partie II] [partie III] [partie IV] [partie V] [partie VI] [conclusion] [biblio]

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20 décembre 2017

L'amoureuse initiation - Milosz

Pâle d'une pâleur de moribond assoupi, l'eau silencieuse des canaux réfléchissait la torpeur d'une ville de palais déserts et de temples abandonnés. Zéphyr balançait mollement, aux balcons fleuris de rouille, les jardins de lianes pensives, noyant aux miroirs ternis la traîne jaunissante de leurs robes de fées. Sur toute la cité de vision planait, en finale de mélodie de rêve, un silence plus irréel que le tintement d'oreilles des fiévreux. La ville que j'avais aimée jeune et joyeuse était morte avec la jeunesse et la joie de mon cœur. Je reconnus le palais ducal où le régent de S… m'avait présenté à la plus douce des belles. Les portes étaient condamnées, les lichens rongeurs avaient envahi les marches disjointes des perrons, l'eau verte des rios noyait les seuils, l'arc-en-ciel brûlé des soleils anciens miroitait en couleurs de poison aux grandes fenêtres indifférentes. J'interrogeais en vain les quatre horizons ; le silence, le crépuscule et l'oubli s'étaient établis en maîtres absolus en tous lieux.
Oscar Vladislas de Lubicz MILOSZ
(1877 - 1939)
(1910)
[L'Amoureuse initiation - Éditions André Silvaire / 1958 / p.27]

Admirable récit d’une passion où la tendresse le dispute à la jalousie. Milosz a fait du drame – de l’ascension – de M. de Pinamonte, qui reflète quelques-unes de ses inquiétudes essentielles, un récit somptueux et fascinant où la Venise de Shakespeare et celle du XVIIIe siècle apparaît comme un personnage double : ville de l’amour heureux et décor de la destruction, de la fin des choses, ville parcourue par les cortèges de Carnaval et par des ombres criminelles ; ville de la fête et du désespoir, de la femme et de l’amour victimes du temps. Pour ses poèmes, les propositions sont les bienvenues…

En 1889 (à l'âge de 12 ans) sa famille s'installe en France (son père est alors soigné par Charcot). En 1896 il obtient le baccalauréat ès lettres et suit jusqu'en 1899 les cours de l'École du Louvre et de l'École des Langues Orientales. Il étudie l'épigraphie hébraïque et assyrienne.
    En 1899 (à 22 ans), publication de son premier recueil, Le Poème des Décadences, à Paris, chez Girard et Villerelle. (voir bibliographie) Milosz aurait pu faire carrière de traducteur : il possède pas moins de quatre langues maternelles (le Russe, le Balte, le Polonais et le Français) et au moins deux autres, apprises à l'âge adulte (l'Anglais et l'Allemand). Il n'écriera et ne publiera qu'en français, trouvant peut-être ainsi quelque illusion d'enracinement dans un pays.
1901 : tentative de suicide.
    Entre 1902 et 1906 il voyage beaucoup : retour sur ses terres de Lituanie, Allemagne, Russie, France, Suisse.

    Assez de littérature, parlons un peu de nous. Je suis, depuis un an et demi, tout seul en Lithuanie, province baltique, dans les terres de mes ancêtres, où je suis retenu par des affaires négligées depuis quarante ans [...]. L'été je monte à cheval et fais des vers par milliers, l'hiver je vais en traîneau et relis Kant, Schopenhauer et Platon, en fumant ma pipe. Je fais aussi de temps en temps de petits voyages avec deux amis, – en Espagne avec Don Quichotte et en Italie avec Henri Heine. On peut s'habituer à tout : l'important c'est de vivre le moins possible dans ce qu'on nomme le monde de la réalité.

    1906 : publication de son second recueil de poèmes intitulé Les Sept Solitudes, à Paris, chez Jouve. (voir bibliographie) Milosz commence une vie d' "errance", voyage dans toute l'Europe jusqu'en 1914 : Allemagne, Pologne, Autriche, Italie, Espagne, Angleterre,... Il apprend plusieurs langues, s'installe à Venise et entre en 1910 dans la période la plus prolifique de sa carrière littéraire, période qui durera jusqu'en 1915 et durant laquelle il publiera notamment L'Amoureuse Initiation (1910).
    1914 : le 14 décembre, Milosz est la proie de ce qu'il nommera plus tard la "nuit d'illumination" durant laquelle il entrevoit "le soleil spirituel". La critique traditionnelle accorde une grande importance à cet événement qui scinde l'existence de l'auteur en deux, en lui donnant souvent bien plus de sens qu'il n'en a. Toutefois, les nouvelles générations de chercheurs semblent peu à peu laisser de côté ce moment d'extase mystique, ou plutôt ils cherchent à le remettre à sa juste place en ne le considérant plus comme un tournant dans l'œuvre de Milosz, mais comme un événement supplémentaire dans sa quête spirituelle.
    La suite de son existence est faite d'un abandon progressif de la littérature au profit de sa carrière diplomatique. Il écrit encore, bien sûr, des poèmes, des poèmes philosophiques, des discours diplomatiques et politiques, mais la première guerre mondiale semble avoir mis un coup d'arrêt à son engouement pour les lettres. On pourra s'intéresser aux "poèmes métaphysiques" des années vingt qui mêlent de façon inextricable littérature, religion, kabbale et philosophie ; textes ésotériques, hermétiques, à propos desquels on peut se demander s'ils entrent vraiment dans le champ littéraire. L'auteur publie son dernier texte, La Clef de l'Apocalypse, en 1938. Atteint d'un cancer, il meurt d'un arrêt cardiaque le 2 mars 1939, juste avant que n'éclate la guerre mondiale qu'il pressentait.

19 décembre 2017

Brest - Gérard Le Gouic

Brest

On y rencontre les marins de toutes flottes

Gérard Le GOUIC

Héritier du côté paternel d'une lignée de meuniers remontant sans interruption au moins au XVIIe siècle, et, du côté maternel, d'une lignée non moins continue de paysans, Gérard Le Gouic est né le 11 juin 1936 à Rédené, petite commune rurale du Finistère-sud. Il partage son enfance entre Paris, où son père est employé de la RATP, et la Bretagne. Au collège Lavoisier, l'un de ses professeurs fut le poète Maurice Fombeurre. Avant de s'installer définitivement en Bretagne, où il s'occupera, pendant trente ans, d'un magasin de souvenirs à l'enseigne Telen Arvor (titre d'un recueil du poète Auguste Brizeux) sur la place de la cathédrale, il s'expatriera en Afrique équatoriale où il séjournera dix années : au Congo, au Tchad, au Cameroun, en Centrafrique. Il vit dans la campagne de Kernevel, non loin de Pont-Aven.

16 décembre 2017

Le bleu de la question - Salah Stétié

Le bleu de la question

Salah STETIE

Né à Beyrouth en 1929, a fait ses études en France. Il a longtemps été diplomate, amabassadeur de son pays auprès de diverses capitales et organisations internationales dont l'UNESCO. Il est l'un des principaux poètes et essayistes arabes contemporains.
Son oeuvre, publiée pour l'essentiel chez Gallimard, José Corti et Fata Morgana, a été traduite dans une dizaine de langues, et a obtenu, en 1995, le grand prix de la francophonie de l'Académie française.

15 décembre 2017

Florilège Byron

Les lois et les institutions sont comme des horloges ; de temps en temps, il faut savoir les arrêter, les nettoyer, les huiler et les mettre à l'heure juste.

On pleure, mais on finit par sourire ; et tout en souriant on pleure.

Les amants et les maris ne doivent pas trop rester dehors. J'ai connu des absents qui avaient tort quatre fois par jour.

 

Les opinions sont faites pour changer ; sinon comment atteindre la vérité ?
Lettre - 9 mai 1817

Mais les mots sont des objets, et une simple goutte d'encre
Tombant telle la rosée, sur une pensée, produit
Ce qui fera réfléchir des milliers, voire des millions.
Don Juan

 

Quand nous enlevons la vie aux hommes, nous ne savons ni ce que nous leur enlevons, ni ce que nous leur donnons.   
Sardanapale

Quand vient l'heure de l'adversité, tous deviennent courageux contre celui qui tombe.
Sardanapale

L'homme qui surpasse ou subjugue l'humanité peut mépriser la haine qu'il laisse sous ses pieds.
Le pèlerinage de Childe Harold

Pour fuir les hommes faut-il donc les haïr ?
Le pèlerinage de Childe Harold

La renommée est la soif de la jeunesse.
Le pèlerinage de Childe Harold

Si l'homme calculait son existence par le bonheur et comptait ses heures de joie pour des années de vie, dites ! Compterait-il jusqu'à soixante ?
Le pèlerinage de Childe Harold

Il suffit à la foule de la vue du sang pour lui en donner la soif, comme la première coupe de vin est le prélude d'une longue débauche.   
Marino Faliero

Nous savons si peu ce que nous faisons en ce monde que je doute même si le doute est vraiment l'action de douter.
Don Juan

Le cœur d'une femme est une partie des cieux, mais aussi, comme le firmament, il change nuit et jour.

La société n'est qu'un jeu où chacun a un but séparé, des intérêts à part, un plan à faire réussir.

L'adversité est la route qui conduit le plus sûrement à la vérité. Celui qui a connu la guerre, les orages et la fureur de la femme, qu'il compte dix-huit ou quatre-vingts hivers, a conquis l'inestimable avantage de l'expérience.
Don Juan

On ne peut pas vivre avec les femmes ni sans elles.

La société se compose de deux groupes : les raseurs et les rasés.
L'amitié est l'amour sans ailes.

Cela a été ainsi - et le sera encore - : sous le soleil le plus grand nombre doit toujours travailler pour quelques-uns.

La haine est certainement le plus durable des plaisirs : on se presse d'aimer, on se déteste à loisir.
Le pèlerinage du chevalier Harold

L'amour d'un homme n'occupe qu'une partie de sa vie d'homme ;
L'amour d'une femme occupe toute son existence.
Don Juan

C'est étrange, mais vrai ; car la vérité est toujours étrange, plus étrange que la fiction.

Plus je vois les hommes, moins je les aime ; si je pouvais en dire autant des femmes, tout serait pour le mieux.

Le souvenir du bonheur n'est plus du bonheur ; le souvenir de la douleur est de la douleur encore.
Marino Falieri

Et si je ris de toute chose ici-bas,
C'est afin de n'en pas pleurer.
Don Juan

Et après tout, qu'est-ce qu'un mensonge ? La vérité sous le masque...
Le pèlerinage du chevalier Harold

Si on le brave, le destin abandonne la plus haute étoile.
Le pèlerinage du chevalier Harold

Dans sa première passion, la femme aime son amant ;
Dans toutes les autres, tout ce qu'elle aime, c'est l'amour.
Don Juan

Les épines que j'ai recueillies viennent de l'arbre que j'ai planté.
Le pèlerinage du chevalier Harold

12 décembre 2017

Chanson II : « Belle Nélahé... » - Évariste Parny

Chanson II : « Belle Nélahé... »

Belle Nélahé, conduis cet étranger dans la case voisine ; étends une natte sur la terre, et qu’un lit de feuilles s’élève sur cette natte ; laisse tomber ensuite le pagne qui entoure tes jeunes attraits. Si tu vois dans ses yeux un amoureux désir ; si sa main cherche la tienne, et t’attire doucement vers lui ; s’il te dit : Viens, belle Nélahé, passons la nuit ensemble ; alors assieds-toi sur ses genoux. Que sa nuit soit heureuse, que la tienne soit charmante ; et ne reviens qu’au moment où le jour renaissant te permettra de lire dans ses yeux tout le plaisir qu’il aura goûté.

Évariste PARNY
(1787)
[Les chansons madécasses]

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CLOPIN - CLOPANT
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